En finir avec la culture du viol

Posted by on octobre 28, 2019 in Essai, Thèque | 0 comments

En finir avec la culture du viol

Essai de Noémie Renard
Les petits matins, 2018 (179 pages)
Présentation de la maison d’édition

Noémie Renard est l’auteure de l’excellent blog Antisexisme. Elle y partage de nombreux articles de fond sur les ressorts de la domination masculine et les mécanismes qui la maintiennent (dont les mythes sur le viol).
La culture du viol, c’est la normalisation et la négation des violences sexuelles. Dans En finir avec la culture du viol, elle offre une synthèse d’une grande richesse et d’une grande clarté sur les causes, les mécanismes et les enjeux de la culture du viol, profondément ancrée dans notre société.
Les causes sont multiples : l’adhésion à l’évidence d’un droit masculin à recevoir du sexe et d’un devoir féminin à en donner, dans un contexte de contrainte à l’hétérosexualité ; les inégalités de genre économiques, sociales, physiques, psychologiques et d’âge ; les stéréotypes de genre, validistes, psychophobes et de race ; les mythes circulant sur le viol, notamment dans le cinéma et la littérature, loin de la réalité de la majorité des viols, commis par des proches et sans violence, et qui font passer des agressions sexuelles pour des pratiques de séduction.
Ces mythes facilitent la perpétuation des violences sexuelles comme leur impunité, tant juridique que sociale (sauf à être une personne racisée ou pauvre). En témoignent de nombreux et récents exemples. On déresponsabilise les agresseurs et on culpabilise les victimes, on pense que d’une manière ou d’une autre elles l’ont « cherché ». Ce déni permet de se rassurer : nous vivrions dans un monde juste où ces violences seraient évitables.
Invitant discrètement à une indispensable introspection, Noémie Renard aborde ce qu’elle appelle la banalité de la coercition sexuelle dans les relations hétérosexuelles. Le fait que nombre d’hommes hétérosexuels obtiennent des relations sexuelles en utilisant la supplication, le chantage, la culpabilisation, la manipulation. Ou qu’ils prennent graduellement le pouvoir au cours d’une relation consentie au départ, pour finir par imposer leurs propres scénarios, ressentis comme violents, humiliants, insultants par leur partenaire. Cela se double, hors des situations de coercition, de comportements dits d’« obéissance sexuelle », quand les femmes (et quelques hommes), acceptent des relations sexuelles non désirées par peur de mettre en péril leur relation amoureuse.
Ni le désir ni le plaisir ne semblent être un prérequis pour nombre de relations sexuelles hétéros, perçues comme obligatoires et scénarisées pour le plaisir des hommes. Ce constat remet en question un autre mythe : celui d’une libération sexuelle qui ne saurait exister, rappelle l’auteure, sans la prise en compte des rapports de pouvoir organisant notre société.
Ce livre percutant se termine sur une série de pistes pour en finir avec la culture du viol, dont la nécessité d’une éducation à l’égalité (notamment à travers une éducation sexuelle adapté à chaque âge) dès la maternelle.

NB : J’ai publié précédemment cette présentation sur le site SVT Égalité.